Les BRA sont fréquemment utilisés dans le traitement de l’hypertension, de la néphropathie diabétique, de l’insuffisance cardiaque et aussi pour réduire le risque cardiovasculaire. Plusieurs études ont été réalisées avec les différents agents de cette classe au cours des dix dernières années. Parmi celles-ci, l’étude CHARM (1) publiée en 2003 a montré de façon un peu surprenante un taux plus élevé de mortalité par cancer dans le groupe traité avec le candésartan. Les récepteurs AT1 et AT2 sur lesquels agissent les BRA sont impliqués dans la régulation de la prolifération cellulaire et également de l’angiogénèse.
Tout ceci a amené Sipahi I. et collaborateurs (2) à faire une méta analyse des études randomisées publiées avec les BRA et à regarder l’incidence de cancer. Après avoir fait une analyse au moyen de différents moteurs de recherche (MedLine, Scopus, Cochrane), ils ont identifié 2 057 études. Ils en ont éliminé initialement 1 997 puis 51 autres. Ils n’ont conservé que 9 études où les données sur l’incidence de cancer étaient suffisamment précises (Life, OnTarget, Transcend, Profess, Charm, Trophy, Val-Heft, Optimal, Valiant).
Pour le critère d’évaluation primaire qui était l’apparition d’un cancer, on avait des données sur seulement cinq études (Life, OnTarget, Transcend, Profess, Trophy). Pour ce critère, la méta analyse a montré un rsique plus élevé de cancer dans le groupe ayant reçu le BRA (7.2% versus 6% P < 0.016). Dans 4 des 5 études, il y avait numériquement plus de cancers dans le groupe ayant reçu le BRA mais il n’y avait pas de différence significative entre les deux groupes. Pour le critère secondaire de mortalité par cancer, 8 études ont été retenues et, il n,Y avait pas de différence significative entre les groupes (1.8% avec le BRA versus 1.6% chez les patients qui n'en premaient pas). On n’a pas pu non plus à partir de ces données, identifier le risque spécifique d’un BRA en particulier.
Cette méta analyse a cependant certaines limitations que les auteurs eux-mêmes n’hésitent pas à qualifier d’importantes. Toutes ces études n’avaient évidemment pas comme premier but la recherche de cancer de sorte que la collecte de données à ce sujet n’a pas été faite rigoureusement dans toutes les études. De plus, les auteurs n’ont pas eu accès aux données individuelles des patients ce qui rend l’analyse plus difficile et une étude très importante, l’étude Value (plus de 15 000 patients) n’a pas été incluse car on n’avait pas de données sur l’incidence de cancer.
Cette méta analyse a donc montré une augmentation légère du risque de cancer de 1.2% sur 4 ans dans le groupe recevant un BRA. Il faut se rappeler que le risque d’avoir un cancer durant une vie dans la population générale est de 41%. Il apparaît donc actuellement prématuré de recommander de cesser les BRA chez les patients compte tenu des bienfaits cardiovasculaires de cette classe et aussi des limitations de cette méta analyse. Cette étude a suscité beaucoup d’intérêts dans la population générale et dans la communauté médicale et il y aura sûrement de nouvelles publications à ce sujet dans la prochaine année.
Dr Marc Houde
Néphrologue, Hôpital Maisonneuve-Rosemont
Références
1- Pfeffer M.A. et coll. :Effects of Candesartan on mortality and morbidity in patients with chronic heart failure :The Charm-Overall programme.Lancet2003;362:759-766
2- Sipahi I. et coll.:Angiotensin receptor blockade and risk of cancer:metaanalysis of randomised controlled trials.Lancet Oncol. 2010;11:627-36