Au début de l’année 2007, une étude très intéressante est passée un peu inaperçu. Il s’agit de l’étude TRAIL. Cette étude se classe parmi les études d’efficacité clinique en pratique courante (étude de phase 4 ou en anglais:‘Effectiveness study’) par opposition aux études plus classiques que nous sommes habitués de lire (études randomisés-contrôlées de phases 2 ou 3 ou en anglais ‘Efficacy study’). Dans les études dites d’‘Effectiveness’, le but est de vérifier si un produit est utile dans la pratique courante. Le devis de l’étude doit alors mimer le plus possible la ‘vraie vie’. Il faut seulement un système de collecte de données qui influence le moins possible les cliniciens. Ce type d’étude est éthiquement valable si le volet ‘Efficacy’ a déjà été bien établi.
Dans l’étude TRAIL, le but était d’évaluer l’efficacité d’un traitement fondé sur le trandolapril à dose croissante pour atteindre les objectifs tensionnelles chez des sujets atteints d’une hypertension artérielle de stade 1 ou 2, en pratique clinique courante de médecine familiale. Le trandolapril est un médicament acceptable pour ce genre d’étude car son volet ‘Efficacy’ a maintes fois été prouvé (études INVEST, BENEDICT, etc.). Étaient inclus dans l’étude les sujets n’ayant jamais reçu de traitement antihypertenseur ou sujets traités par un diurétique ou un bloqueur des canaux calciques sans que l’HTA soit maîtrisée au début de l’étude. Les cliniciens étaient ensuite invités à utiliser un algorithme simple où, en évaluant les patients aux 4 semaines durant une période de suivi de 26 semaines, on devait augmenter la dose de trandolapril afin de viser une TA en bas de 140/90 ou 130/80 chez les sujets diabétiques. L’utilisation de vérapamil était aussi permise si le sujet n’avait pas atteint les cibles tensionnelles à la dose maximale de trandolapril. 1650 patients de partout au Canada ont complété l’étude.
Au départ, 83% des patients n’avaient jamais été traités pour HTA. Au total, après 26 semaines de traitement, la TA est passé de 155/93 à 132/80 et la réduction moyenne de TA a été de -22/-13. Parmi tous les patients, 73,4 % ont atteint les valeurs cibles. Chez 70 % des patients, la TA était maîtrisée (< 140/90) par monothérapie avec trandolapril après 14 semaines. Chez 40 % des patients n’ayant jamais reçu de traitement pharmacologique antihypertenseur, l’hypertension a été maîtrisée par une dose minimale quotidienne de 1 mg. Parmi les patients diabétiques, 24,3 % ont atteint les valeurs cibles de TA (< 130/80) en monothérapie, et 32,9 % avaient atteint cet objectif après 26 semaines avec un traitement adjuvant. En conclusion, le recours à un algorithme décisionnel permet de maîtriser rapidement l’hypertension en pratique courante en utilisation peu de médicaments. La clé de ce succès semble être de revoir rapidement les patients (aux 4 semaines) afin de vérifier la réponse au traitement et d’augmenter ce traitement sans plus attendre si les cibles ne sont pas atteintes. Il est à noter que malgré l’utilisation d’un algorithme agressif, le taux de succès, quoique bon, n’est pas à 100%, surtout chez les patients diabétiques. Il reste donc du chemin à faire afin de sensibiliser davantage les cliniciens de premières lignes à l’importance de contrôler l’HTA et d’atteindre rapidement les valeurs cibles. Dr Michel Vallée MD PhD FRCP(C) Néphrologue, Hôpital Maisonneuve-Rosemont Référence :
Tytus RH, Burgess ED, Assouline L, Vanjaka A: A 26-week, prospective, open-label, uncontrolled, multicenter study to evaluate the effect of an escalating-dose regimen of trandolapril on change in blood pressure in treatment-naive and concurrently treated adult hypertensive subjects (TRAIL). Clin Ther. 2007 Feb;29(2):305-15