DÉFINITIONS, CLASSIFICATION, FACTEURS DE RISQUE ET RISQUE DE RÉCIDIVE
Certaines femmes, dont la pression artérielle est habituellement normale, peuvent faire de l’hypertension durant la grossesse. Il s’agit de l’une des complications les plus courantes qui se produit dans environ 7 % des grossesses au Canada.
L’hypertension artérielle durant la grossesse est définie par une pression artérielle systolique (PAS) ≥ 140 mm Hg et/ou une pression artérielle diastolique (PAD) ≥ 90 mm Hg lorsque la pression artérielle est mesurée en clinique ou au bureau.
Hypertension chronique (préexistante)
Hypertension artérielle connue avant la grossesse ou qui s’est déclarée avant 20 semaines :
- essentielle pour la plupart, certaines femmes peuvent par contre avoir une cause secondaire.
- dans la plupart des cas, la pression artérielle diminue dès le début de la grossesse, puis elle atteint un nadir vers 20 semaines pour remonter à partir des 28 semaines de grossesse.
- une prééclampsie surajoutée à ce type d’hypertension est possible.
Hypertension artérielle gestationnelle
Hypertension artérielle qui se déclare à partir de 20 semaines ou en post-partum et qui disparaît à l’intérieur de six semaines post-partum :
- il s’agit de la forme le plus fréquente d’hypertension en grossesse, apparaissant dans 5 à 6 % des grossesses.
- l’hypertension gestationnelle peut évoluer vers une prééclampsie, surtout si elle se présente avant 34 semaines.
Prééclampsie, incluant le syndrome HELLP*
Hypertension artérielle accompagnée d’une protéinurie et/ou de symptômes (ex. : céphalée, scotomes, douleur abdominale haute, convulsion) et/ou de résultats anormaux des prises de sang ou d’urine.
La prééclampsie inclue le plus souvent une atteinte du placenta, ce qui nuit à la croissance du foetus :
- elle survient dans 1 à 3 % de toutes les grossesses et peut débuter en post-partum.
*HELLP : terme anglais qui signifie « hémolyse, augmentation des enzymes hépatiques, plaquettes basses – syndrome grave qui génère entre autres une destruction des globules rouges et provoque une anémie »
Adapté de : Butalia et al. Management of Hypertension in Pregnancy
Hypertension Canada’s 2018 Guidelines for the Management of Hypertension in Pregnancy. Canadian Journal of Cardiology 34 (2018) : 526-531.
- Première grossesse (10 % de toutes les premières grossesses)
- Première grossesse avec un nouveau partenaire
- Moins de 2 ans ou plus de 10 ans depuis une grossesse antérieure
- Antécédent personnel de prééclampsie
- Antécédents familiaux de prééclampsie (1er degré)
- Présence d’une maladie avant la grossesse (ex. : hypertension chronique, diabète, maladie rénale, présence de lupus érythémateux disséminé ou de syndrome antiphospholipide)
- Âge maternel avancé (plus de 40 ans)
- Obésité
- Grossesse multiple (jumeaux – triplés ou autres)
- Traitement de reproduction assistée (fertilisation in vitro – don d’ovule ou de sperme)
- Mort foetale ou signe d’insuffisance placentaire lors d’une grossesse antérieure
Les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité chez les femmes adultes. Il est utile de rappeler aux femmes qu’il n’y a souvent aucun symptôme pendant plusieurs années jusqu’à ce que la maladie soit avancée et cause des complications tels un infarctus du myocarde ou un accident vasculaire cérébral.
L’hérédité joue un rôle important comme facteur de risque, mais elle est malheureusement non modifiable. Par contre, en modifiant les autres facteurs de risque rapidement, il est possible de prévenir et de ralentir la maladie cardiovasculaire et ses conséquences dans 80 % des cas.
Facteurs de risque traditionnels (comorbidités)
- Hérédité
- Prééclampsie
- Hypertension artérielle chronique
- Diabète
- Surplus de poids et obésité
- Tabagisme
- Dyslipidémie
- Sédentarité
Facteurs de risque reliés à la grossesse
Risque faible
- HTA gestationnelle sans comorbidité ou non récidivante (RR : 1,6)
- Prééclampsie non grave à terme (> 37 semaines) sans comorbidité ou récidive (RR : 2,0)
Risque élevé
- HTA gestationnelle avec comorbidité(s) et/ou récidive
- Prééclampsie non grave à terme (> 37 semaines) avec comorbidité(s) et/ou récidive
- Prééclampsie avant terme (< 37 semaines) (RR : 5,36)
- Prééclampsie grave (avant ou à terme) (RR : 2,99)
RR : risque relatif – Comorbidité(s) : facteur(s) de risque traditionnel(s)
- Une femme ayant présenté un trouble hypertensif de la grossesse est plus à risque d’une récidive lors d’une future grossesse.
- Le risque est particulièrement accru chez une femme présentant une histoire de prééclamsie précoce (avant 34 semaines) ou récidivante.
- Le risque de récidive est moins élevé en cas d’une histoire de prééclampsie à terme (37 semaines ou plus) ou d’une HTA gestationnelle sans complication.
- Plus la femme présente un grand nombre de facteurs de risque pour un trouble hypertensif de la grossesse, plus son risque de récidive est grand.
- Si aucune intervention n’est faite, les femmes ayant présenté une prééclampsie précoce ont jusqu’à 40 % de risque de récidive lors d’une future grossesse.
- En général, le risque de récidive de prééclampsie sera moins grave et la prééclampsie se présentera plus tard au cours de la grossesse, selon les facteurs de risque et les interventions de prévention mises en place.
- Pour les femmes ayant présenté des formes moins précoces et moins graves, entre 15 et 25 % d’entre elles auront une récidive lors d’une grossesse subséquente.
- Il est important de rappeler que ces femmes ont généralement plus de chance d’avoir une grossesse subséquente normale qu’anormale, selon les facteurs de risque présents.
Avant la grossesse
- En général, un délai d’au moins deux ans entre le début de la première grossesse et le début de la suivante est proposé. Ainsi, il est conseillé qu’une femme attende que son premier enfant soit âgé d’au moins 15 mois avant de devenir enceinte d’un autre enfant.
- Le surplus de poids étant un des facteurs de risque modifiables les plus importants, il est recommandé qu’une femme atteigne son poids santé ou un poids le plus proche possible de celui-ci avant sa prochaine grossesse.
- De plus, prendre l’habitude de faire de l’activité physique régulièrement avant la grossesse et très important.
- Il est aussi recommandé que les autres maladies soient bien maîtrisées s’il y a lieu (ex. : diabète).
Pendant la grossesse
- Il est important d’offrir un suivi approprié durant la grossesse, surtout après 20 semaines, qui inclut des visites fréquentes et des échographies pour vérifier la croissance et le bien-être du foetus.
- La prise de pression artérielle à la maison peut aider à monitorer l’augmentation de la pression artérielle tout au long de la grossesse.
- Un apport suffisant en calcium (minimum 2 portions de produits laitiers par jour) diminue le risque de prééclampsie et est recommandé à toutes les femmes enceintes. Idéalement, 3 à 4 portions de produits laitiers par jour sont recommandées en grossesse pour la santé osseuse.
- Si la femme est considérée à risque de prééclampsie dès le début de la grossesse, l’acide acétylsalicylique (Aspirine) à faible dose (81-162 mg par jour pris préférablement au coucher) peut être prescrit. Idéalement, l’aspirine doit être initiée entre 8 et 16 semaines de grossesse.
- Maintenir de l’activité physique régulièrement, avoir une alimentation saine et veiller à la diminutions du stress sont généralement conseillés pour une grossesse en santé.
La patiente ayant présenté une prééclampsie précoce ou grave lors d’une grossesse antérieure devrait être référée en médecine obstétricale ou en obstétrique-gynécologie (grossesse à risque élevé) en préconception ou dès le début d’une nouvelle grossesse.