L’hypertension artérielle réfractaire au traitement se définit généralement par l’impossibilité d’obtenir une maîtrise adéquate de la tension artérielle malgré l’administration d’au moins trois médicaments différents. Les stratégies le plus souvent employées pour venir à bout de ce problème consistent à ajouter ou à substituer un médicament afin de produire un effet synergique avec les autres agents de la thérapie. Dans la revue Hypertension du mois d’octobre 2007, Hermida et ses collaborateurs1 ont évalué l’impact de modifier le moment d’administration de la médication antihypertensive – sans pour autant modifier le nombre d’agents qui la composent – sur le cycle circadien de la tension artérielle et sur la réponse au traitement chez des patients souffrant d’hypertension réfractaire. Ainsi, 250 patients dont les tensions artérielles cliniques et ambulatoires demeuraient élevées en dépit d’une triple thérapie antihypertensive ont été répartis aléatoirement dans l’un ou l’autre des 2 groupes suivants : administration des 3 agents antihypertenseurs le matin ou administration de 2 agents antihypertenseurs le matin et du troisième au coucher. La tension artérielle a été évaluée par monitoring ambulatoire à l’état basal et 3 mois après la randomisation.
Les résultats de l’étude montrent que les tensions artérielles ambulatoires des patients traités selon le devis d’administration uniquotidienne du matin ne se sont pas significativement améliorées après 3 mois de traitement. Le pourcentage de patients présentant un profil tensionnel élevé durant la nuit (communément appelés « non-dippers ») est même passé de 79% à 86%. En contrepartie, les patients du groupe recevant un des 3 agents antihypertenseurs au coucher ont présenté des abaissements significatifs de la tension artérielle ambulatoire (abaissements moyens de 9.4/6.0 mmHg des tensions artérielles systolique/diastolique des 24 heures; P<0.001 versus devis d’administration du matin), ce qui s’est traduit par une maîtrise de la tension artérielle chez 37% des sujets de ce groupe. Les réductions ont été supérieures pour la période de nuit par rapport à celles pour le jour, ce qui a amélioré le pourcentage de patients dits « non-dippers » de 84% à 43% (P<0.001). Dans les 2 groupes à l’étude, les stratégies d’administration ont eu peu d’effet sur le rythme cardiaque. Les triples thérapies utilisées durant l’étude combinaient généralement un diurétique thiazidique avec un inhibiteur de l’ECA (34.4% des patients) ou un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine (65.6% des patients) auxquels on adjoignait un bloqueur des canaux calciques à longue action (amlodipine ou nifédipine GITS; 52.8% des patients) ou un bloqueur des récepteurs alpha-adrénergiques à longue action (doxazosin GITS; 47.2% des patients). La comparaison de ces associations médicamenteuses n’a pas révélé de différence importante du point de vue de l’efficacité antihypertensive. Plusieurs études ont démontré que le risque cardiovasculaire associé à l’hypertension artérielle s’accroît davantage si les tensions durant la nuit demeurent élevées plutôt que de se normaliser. Les résultats de la présente étude indiquent que le moment d’administration des agents antihypertenseurs, plus que la nature des combinaisons de médicaments utilisées, représente un déterminant important de la réponse au traitement de l’hypertension artérielle réfractaire. Dans la perspective où l’hypertension réfractaire s’accompagne souvent en clinique d’un phénomène de la blouse blanche et d’hypertension artérielle nocturne, le recours au monitoring ambulatoire de la tension artérielle est, par ailleurs, des plus utiles. Jean Lefebvre, pharmacien. Référence :
Hermida RC, Ayala DE, Fernandez JR, Calvo C. Chronotherapy Improves Blood Pressure Control and Reverts the Nondipper Pattern in Patients With Resistant Hypertension. Hypertension. 2007 Oct 29; [Epub ahead of print].