Nous savons que les individus présentant une mauvaise condition cardiorespiratoire ont souvent une tension artérielle (TA) plus élevée. Les sujets moins en forme ont aussi tendance à avoir un taux d’adiposité viscérale plus important que les individus en bonne condition physique. Rhéaume et coll. ont récemment publié dans la revue Hypertension une étude visant à tester l’hypothèse à l’effet que, chez les individus en mauvaise condition physique, l’hypertension artérielle pourrait, du moins en partie, être reliée à un niveau élevé d’obésité viscérale. Pour ce faire, ils ont recruté 407 sujets, hommes et femmes, en bonne santé apparente et non diabétiques. L’âge moyen était d’environ 37 ans, l’indice de masse corporelle moyen de 26.1 kg/m2 et le tour de taille de 89.0 cm et 80.6 cm, chez les hommes et les femmes, respectivement. Quant à leur TA, 290 sujets avaient des TA normales, 100 présentaient un état de préhypertension et 17 étaient franchement hypertendus, sur la base des lignes directrices américaines. La masse adipeuse viscérale a été évaluée par tomodensitométrie et leur condition physique, au moyen d’un test progressif de capacité à l’effort sous-maximal.
L’analyse de leurs résultats leur a permis de démontrer que les sujets se situant dans le tertile supérieur d’obésité viscérale présentaient les TA systolique/ diastolique les plus élevées alors que les individus classés dans le tertile associé à la meilleure condition physique présentaient les TA les plus basses. De plus, si on classait les individus selon les tertiles de condition physique mais qu’on les stratifiait selon leur niveau d’adiposité viscérale (élevé vs faible), ceux présentant un niveau élevé d’adiposité viscérale avaient les TA les plus élevées et ce, sans égard à leur niveau de condition physique. Des analyses de régression linéaire ont ainsi permis de démontrer que, globalement, les niveaux de TA systolique et diastolique pouvaient être prédits par l’âge et le tissu adipeux viscéral mais, pas par la condition physique. Si on stratifiait selon le sexe des participants, l’âge se révélait comme le meilleur prédicteur chez les hommes alors que l’âge et le niveau d’adiposité viscérale étaient les meilleurs prédicteurs de tension artérielle élevée chez les femmes. Il importe aussi de noter que la relation entre la tension artérielle et le tour de taille était non significative après ajustement pour l’adiposité viscérale. Ceci suggérait donc que la relation entre le tour de taille et la tension artérielle pourrait être expliquée par le niveau d’adiposité viscérale.
Les résultats de cette étude démontrent donc que les individus en bonne forme physique présentent des TA systolique/diastolique significativement plus basses que les individus en piètre condition physique. Cependant, cette étude démontre pour la première fois que les bénéfices associées à une bonne forme cardiorespiratoire sont limités aux sujets qui présentent un faible taux d’adiposité viscérale et ce, sans égard à l’indice de masse corporelle ou au tour de taille. Les auteurs concluent sur la base de leurs résultats que l’obésité viscérale pourrait donc être une cible importante lors de la prise en charge du patient hypertendu.
Luc Poirier M.Sc. pharmacien
Unité d’hypertension et Département de Pharmacie
Centre Hospitalier Universitaire de Québec
Référence
Caroline Rhéaume, Benoit J. Arsenault, Stéphane Bélanger, Louis Pérusse, Angelo Tremblay, Claude Bouchard, Paul Poirier, Jean-Pierre Després. Low Cardiorespiratory Fitness Levels and Elevated Blood Pressure. What Is the Contribution of Visceral Adiposity? Hypertension 2009 ; 54 :00-00